Du potentiel à sa non-réalisation

En pleine crise de zèbritude aigüe, ces jours-ci. Dans son « Petit guide à l’usage des gens intelligents qui ne se trouvent pas très doués », Béatrice Millêtre écrit : « la motivation est une sorte de bouton « marche/arrêt » : si elle n’est pas là, il ne se passe pas grand chose. Si elle est là, je peux déplacer des montagnes. »

Eh ben, là chez moi le bouton est sur arrêt. Il l’est souvent, d’ailleurs. Je me sais parfaitement capable de faire des tas de choses, j’ai plein de talents différents, qu’ils soient artistiques ou non. Professionnellement, je peux m’adapter à de nombreuses situations. J’ai d’ailleurs déjà pas mal zigzagué d’un domaine à l’autre. Des tas d’autres m’ont tentée, et je crois que dans chacun j’aurais réussi.

Mais, à chaque fois, je n’ai pas eu assez envie. Me suis enflammée, mais chez moi ça se consume vite et après je suis lassée. Au point qu’aujourd’hui j’ai peur de m’engager dans des activités impliquant d’autres personnes, parce que je me sais capable de tout plaquer quelques mois après. Je l’ai déjà fait, et les autres ne comprennent pas.

Le labyrinthe de la vieBref, je me reconnais comme une personne à haut potentiel, mais ça n’a rien à voir avec la réussite. Aujourd’hui, à plus de 40 ans, j’ai pas mal d’années de trou dans mon parcours professionnel, périodes de non-travail, indemnisé ou pas. Je viens d’ailleurs de refuser un contrat de 3 ans, prolongation d’un boulot provisoire dans le cadre duquel j’avais fait du très bon travail. J’ai refusé parce que, chaque fois que je pensais à ces 3 ans, une chappe d’ennui me tombait sur les épaules, accompagnée de la question qui tue : « est-ce que ça va me rendre plus heureuse de faire ce boulot ? plus utile au monde ? plus avancée humainement ? ». Elle a tué.

Alors j’ai décidé de prendre une année sabbatique, pour apprendre, expérimenter, trouver qui je suis, ce que je fous sur terre, et à quoi ça peut bien servir. En fait, au départ, c’était pour me lancer dans un projet artistique. Mais ça fait presque deux mois maintenant, et je n’ai quasiment rien « pondu » de ce projet. Me retrouve face à la feuille blanche, face à mes angoisses et interrogations, face à moi-même sans l’excuse d’une vie professionnelle prenante pour éviter de penser à ce qui compte vraiment. Le nez dedans, quoi. Résultat : le flip intégral. Alors, je me dis que c’est une épreuve genre initiatique à traverser. D’abord, découvrir ce que je veux faire du reste de ma vie. Ensuite, y aller pour de bon. Mais en attendant la révélation, l’illumination, eh ben c’est pas de la tarte.

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